1 Selon vous,
qu’est-ce que l’art en général ? (Ce doit être une
définition tout à fait personnelle. Pas la peine de regarder dans
le dictionnaire).
Je pourrais
donner de nombreuses définitions à quelque chose d’aussi abstrait
que l’Art. Mais parmi la multitude presqu’infinie des natures
qu’il peut prendre selon le point de vue qu’on décide de lui
porter, j’aimerais avant tout insister sur le vecteur humaniste
qu’il représente : par la flagrante démonstration qu’il
nous fait de notre unité humaine, par-delà toutes les apparentes
dissensions culturelles, il fait de nous des frères, et rend
confiance en l’Avenir.
2 A
vos yeux, qu’est-ce que votre art pour vous-même ? (Un moyen
d’expression ? Un moyen de survie ? Un moyen d’exister ?
Détaillez S.V.P.)
L’Art me
rappelle sans cesse que toute chose est sujette à interprétation,
et que les perspectives sont la clef de la nature illusoire des
choses.
Partant de
là, l’Art réinvente chaque jour tout ce qui m’entoure, ainsi
que tout ce qui me compose. Par cet acte de création dynamique, et
pour ainsi dire autonome, l’Art devient la magie qui rend sa
substance à la Réalité.
3 La
création répond t-elle à un besoin précis chez vous ? Si oui,
lequel ?
J’ai fait quatre séjours dans des cliniques psychiatriques pour alcoolisme et maniaco-dépression…
L’Art
fut la perche à laquelle je me raccrochai, et devint littéralement
le garde-fou par lequel je délimitai l’abîme, par un lent et
précautionneux travail d’intropspection.
4 Si,
à partir de demain, vous n’étiez plus capable de pratiquer votre
art pour le reste de vos jours… Comment réagiriez-vous ? Serait-ce
la fin du monde, pour vous ? Que feriez-vous pour remplacer ce manque
?
L’Art
est une dynamique. Son vecteur est l’âme, et cela bien avant la
considération de quelque modalité d’expression. J’ai du mal à
imaginer quelle horrible Fatalité pourrait contraindre un Homme
déterminé à la stérilité artistique.
Cela dit,
d’un point de vue autrement plus pragmatique, je comprends la
catastrophe personnelle que peut représenter la privation des
aptitudes ou des organes qui permettent la création dans le mode au
sein duquel on a si longtemps travaillé en vue d’arriver à
exprimer ce que l’on avait en soi, en gestation.
J’ai
personnellement été amené à m’interroger sur ce thème après
les opérations que j’ai subies au niveau des pouces, et qui m’ont
un temps fait craindre le pire.
Mais au
final, et toutes ces réflexions considérées, je crois que je ne
peux mieux exprimer ma conclusion, mon choix, ma déontologie, qu’au
travers de cette phrase, que l’on retrouve sur mes sites et qui me
tient de leitmotiv : "Ne jamais finir amer ou brisé. ".
5 Quels
sont les artistes qui vous ont influencé dans votre façon de
créer ? Ou quel est l’art qui vous a influencé dans votre
façon d’appréhender votre propre travail artistique ?
Les
expressionnistes allemands et l’abstraction lyrique en général.
6 Pensez-vous
qu’il y a quelque chose de "mystique", de "surnaturel",
de "métaphysique" (quelque chose qu’on pourrait
qualifier d’intangible et/ou d’indicible, mais de supérieur à
l’Homme) dans votre processus de création ?
Lorsque
j'observe mes créations, je suis bien obligé de m'avouer qu'elles
conservent toutes substantiellement une certaine harmonie.
Même
si je tente de consciemment les déformer, dans le chaos, la violence
ou l'absurdité... de les rendre hideuses et vides... elles
conservent leur âme. Et c'est pour moi un sujet de grande
interrogation.